Le projet pARTicipe! explore de nouvelles façons de travailler avec des groupes d'enfants ou d'adolescents autour de la culture. Pour ces ateliers d’expérimentation, Lasso a entamé une collaboration avec un groupe communautaire de Minor-Ndako. Cette organisation offre des soins et un accompagnement adapté à des enfants et à des jeunes en situation difficile.

Vous découvrirez ci-dessous comment cela a vu le jour et les rôles que les superviseurs et les partenaires ont joués. Si vous voulez savoir comment les artistes ont vécu l’expérience, plongez-vous dans leur interview.

Groupe de vie Benjamin

Pour cet atelier expérimental pARTicipe!, nous avons travaillé avec Minor-Ndako. Basée à Anderlecht, cette association accueille 12 enfants de 0 à 12 ans dans la communauté résidentielle Benjamin. Les enfants qui y sont admis sont séparés de leurs parents temporairement. Parfois, c'est pour une courte période, parfois pour une période plus longue. Chaque enfant a son parcours qui lui est propre et bénéficie d'un accompagnement personnalisé, avec sa famille. Certains enfants vivent à temps plein dans la communauté et d'autres rentrent chez eux quelques jours par semaine.

Une équipe de 7 éducateur.rices, un superviseur et quelques assistants ménagers s'occupent des enfants au quotidien. Ils se relaient afin qu'il y ait toujours une personne présente pour les enfants, de jour comme de nuit. Il s'agit d'un contexte assez complexe pour un atelier expérimental, car les éducateurs/accompagnateurs et les enfants peuvent changer tous les jours.

Découvrir les intérêts et les talents culturels

Avant de lancer l’atelier expérimental, il était crucial de sonder les intérêts culturels et les talents présents au sein du groupe. Comme les âges étaient très différents, nous avons procédé de 2 façons. Pour les enfants de 7 à 12 ans, nous avons organisé une session BabbelArt ludique. Les enfants de 3 à 7 ans, entourés de leurs accompagnateurs individuels et/ou de leurs parents, ont travaillé sur un dessin à colorier de Navigate Youth. Nous avons regroupé leurs intérêts dans un parcours de découverte accessible à tous qui comprenait une initiation à la boxe à la Kureghem Boxing Academy, des activités de Radio 1070, une sortie à la piscine en plein air Flow et le festival en ligne "VanKleinsAfAan" de la Cie sQueezz.

Peu de temps après, certains enfants de la communauté ont appris qu’ils pouvaient réintégrer la cellule familiale ! D'autres ont été transférés dans un autre groupe communautaire. À ce moment-là, l’atelier expérimental a été mis entre parenthèses jusqu'à ce qu’un autre groupe se constitue.

© Ernst Maréchal – résidence VanKleinsAfAan

Collaboration avec la Cie Squeezz

Quelques mois plus tard, un groupe était à nouveau au complet. En revanche, en termes de dynamique et d'âge, c'était complètement différent. Comme il y avait surtout de jeunes enfants, nous avons décidé avec Minor-Ndako de nous associer avec la Cie sQueezz. Leur festival en ligne avait été bien accueilli. Et vu leurs années d'expertise avec les petits, cela nous a semblé être le partenariat idéal.

Marie-Rose Mayele, coordinatrice artistique de la Cie sQueezz, a tout de suite fait le lien avec leur projet VanKleinsAfAan, dans lequel des artistes partent en résidence dans une crèche ou une garderie pendant une semaine. Ils ont invité les artistes Heike Langsdorf (performance) et Ernst Maréchal (son et musique). Le duo a d'abord développé du matériel artistique pour le groupe, puis l'a testé et perfectionné en interaction avec les enfants.

Chaque jour, les deux artistes partaient en exploration créatrice avec 5 enfants de 2 à 7 ans. Cela s'est fait autour de 2 thèmes : "toucher les choses qui nous entourent" et "découvrir leur son". Heike et Ernst sont partis d’objets quotidiens présents dans la communauté et ont expérimenté, en se posant la question : « qu’entendons-nous lorsque nous écoutons nos propres manipulations ? » Les artistes ont réalisé des enregistrements audios avec les enfants, associés à des dessins. Heike et Ernst ont ensuite produit des sons nouveaux, à partir des dessins, qui leur servaient de partitions vocales. Écoutez le résultat de ces expériences :

Impliquer les animateurs et éducateurs

Cet atelier expérimental a pris tout particulièrement en considération les accompagnateurs, qui ont aussi participé à une session avec les artistes. La responsable d'équipe, Hanne, a jugé important de les impliquer intensivement dans l’atelier expérimental. Elle voulait les stimuler et leur donner des outils pour encourager les enfants à être créatifs. Cette session s'est inscrite dans un cadre plus large de formation des accompagnateurs pour les préparer à encarder la création et des moments de jeu. En effet, un groupe communautaire a besoin de plus de structure qu'une famille moyenne. Il s'agit de créer une atmosphère saine et d’apporter des éléments de jeu spécifiques. Et d’orienter les enfants vers des activités sans avoir une approche ‘scolaire’

Nous réfléchissons à l’alternance entre jeu libre et jeu supervisé, en observant l’impact de ces 2 approches sur le travail d'un.e accompagnateur.rice et en réfléchissant au cadre à établir.

- Hanne (coach)

Selon Hanne, certains enfants n’arrivent pas à être pris dans le jeu, alors que c’est très important pour leur développement. A l’inverse, les artistes font du jeu leur métier, en fonction de ce qui les fascine ou ce qui les rend curieux. C’est pourquoi Marie-Rose imaginait que la présence des artistes pourrait créer un déclic, de l’intérêt, tant chez les enfants que chez les animateurs.

Ce fut une expérience particulière pour les animateurs. Beaucoup ont dit qu'au début, ils et elles étaient un peu sceptiques concernant la session. Cela leur a demandé de sortir de leur zone de confort. Mais la résidence a finalement été source d’inspiration pour appréhender la relation avec les enfants

C'était beau de voir comment nous avons appris à connaître les enfants d'une manière différente. Les enfants ont aussi appris à se connaître et à connaître les autres, différemment.

- Accompagnateur 1

Ce fut une véritable révélation pour moi de voir comment les enfants se calmaient pendant les ateliers, même après une journée éprouvante ou un moment difficile. Les ateliers les ont aidés à se plonger dans leurs émotions et à retrouver la paix.

- Accompagnateur 2

Zoom sur le quartier

Au cours de cet atelier expérimental, nous avons voulu faire connaissance avec les organisations culturelles du quartier, en fonction de ce qui est possible dans un contexte de crise sanitaire. Pour cela, Beatriz de Lasso a réalisé un scan de quartier regroupant un grand nombre d'organisations et d'activités locales. L'intention était aussi de permettre aux accompagnateurs de faire la connaissance d’opérateurs culturels et d’acteurs du secteur des loisirs, et d’avoir accès plus facile à leurs activités. Malheureusement, la pandémie a mis des bâtons dans les roues du projet...

Cependant, un échange fructueux a eu lieu avec l'école Steiner qui se trouve dans la même rue. Le dernier jour de la résidence, une vingtaine d'enfants de l’école maternelle ont participé à une séance avec les artistes. Bien que les enfants n’étaient pas autorisés à se rencontrer physiquement à ce moment-là, c'était tout de même l’occasion pour la communauté de mieux se connaître ses voisins.

Une collaboration réussie avec différents partenaires

De nombreux partenaires ont été impliqués dans l'organisation de cet atelier expérimental, et ce, à différents niveaux. Il était donc essentiel de leur apporter régulièrement un feedback et de mettre en place des évaluations à différentes étapes, pour donner des infos sur l'état d’avancement et s’assurer que les besoins de tout le monde étaient comblés.

Marie-Rose de Ciee sQueezz tire un bilan positif de cette collaboration. Si les moments de consultation étaient plus fréquents que ce qui est de mise habituellement pour un projet VanKleinsAfAan standard, ils étaient plus approfondis et les tâches étaient divisées. Pour elle, c'est un bon exemple de projet dans lequel chacun joue un rôle spécifique. Seule la collaboration permet de rendre cela possible.

C’était plus lourd en termes de charge de travail, mais c'était plus riche, et j'ai aimé ça.

- Marie-Rose

Avant le début de la semaine de résidence, certains superviseurs craignaient que le dispositif soit difficile à combiner à la réalité du terrain de la communauté. Après l'école, il y a beaucoup à faire en peu de temps : les enfants doivent prendre un bain, faire leurs devoirs, manger... Et l'heure du coucher arrive vite. Comme il nous semblait important d’être sur la même longueur d’onde en termes d’organisation avant d'inviter les artistes, nous avons cherché des solutions ensemble. L'accent a été mis sur la recherche d'un équilibre dans le rythme quotidien. Ce qui en est ressorti rétrospectivement ? Que la semaine de résidence a finalement moins chamboulé l’organisation que prévu.

Certains d'entre nous ont dû s'adapter pour trouver du temps pour les ateliers. Mais nous y sommes parvenus. Nous avons dû nous dépêcher un peu plus, mais les enfants ont vraiment apprécié et c'est bien sûr le plus important.

- Seren (accompagnatrice)

Note finale commune autour du résultat obtenu

Deux mois après la semaine de résidence, les artistes Heike et Ernst sont retournés dans la communauté avec le matériel audio et visuel terminé. Les enfants ont eu l'occasion de se regarder et de s'écouter. Se voir en action a eu un effet de confrontation ; cela les a mis en contact avec eux-mêmes et leur a donné un regain de confiance en eux. Avec beaucoup de fierté, ils ont chacun trouvé un endroit dans leur chambre pour accrocher les images qu'ils ont choisies. Les espaces partagés ont également été égayés par ces beaux souvenirs.